13 juillet 2007

Pourquoi la politique ?


Voilà plusieurs mois déjà que je cherche, à travers ce blog, à commenter et à réfléchir sur la politique en général. Ce n'est là que l'aboutissement de longues années d'intérêt voire de passion pour ce domaine. D'abord, petit, on commence par regarder des débats politiques auxquels on ne comprend rien mais qui semblent fascinants. Ensuite, on commence à appréhender la multitude des thèmes que recouvre l'action politique, on est littéralement noyé par les informations, on se dit qu'on n'arrivera jamais à avoir une vision d'ensemble cohérente. Enfin, on prend confiance, on gagne en expertise, on commence à trouver que les débatteurs politiques que l'on prenait naguère pour des spécialistes racontent en fait souvent n'importe quoi. Tel a été mon cheminement passif vers la politique : elle s'est imposée à moi naturellement et progressivement. Mais pourquoi s'intéresser à la politique ?

Il y a deux manières d'appréhender cette question : on peut se demander l'intérêt qu'il y a de faire de la politique ou en quoi la politique est intéressante. La recherche du pouvoir, d'une place dans l'histoire et donc d'une certaine forme d'immortalité sont naturellement à l'oeuvre si l'on retient la première logique. Mais il serait inutile et vain d'essayer de trancher ici les rapports entre les Hommes et le pouvoir, c'est donc la deuxième approche qui sera ici examinée.

La politique, c'est l'organisation de la cité, elle intervient dès lors que les individus se constituent en sociétés. Il y a donc une nécessité d'organiser la société selon des lois, des normes ou des codes. Il faut ensuite faire appliquer ces règles et donc bâtir un véritable pouvoir politique. S'engager dans la vie publique permet donc d'arbitrer les problèmes entre les individus et, mieux, de les prévenir. L'homme politique est dans ce cas un "ingénieur social" chargé de prévenir les mécontentements.

Mais plutôt que de considérer, comme je viens de le faire, la politique comme une nécessité due à l'organisation sociale, on peut la voir comme une volonté ou une demande de lien social. Il ne s'agit pas, en effet, de régler simplement les problèmes qui se posent, il faut aussi mettre sur la table ce qui ne fait pas problème mais qui est susceptible d'être un progrès de la société. Ainsi, on peut considérer la laïcité comme un instrument nécessaire de la paix sociale ou bien comme une formidable avancée dans l'organisation de la société, en séparant le temporel du spirituel. On peut voir le système fiscal comme un moyen de financer les besoins de l'Etat ou comme une mise en commun, selon leurs moyens, des citoyens afin de construire des projets collectifs et de se dessiner un avenir commun.

Le XXème siècle nous invite toutefois à être prudent et à ne pas trop idéaliser la politique. Le totalitarisme a montré les dangers de l'exaltation du collectif et de la négation de l'individu, il a prouvé que l'Etat devait savoir rester à sa place et ne pas s'immiscer dans la vie des gens. Tout l'art de la politique doit être de trouver une voie entre l'individualisme forcené qui se développe actuellement au nom de la liberté et le collectivisme qui mène au totalitarisme. La révolution libérale des années 80, en partie fondée sur l'antitotalitarisme, conduit aujourd'hui à une situation où c'est bien l'individualisme qui est le principal danger qui guette nos sociétés.

L'individualisme, en effet, c'est le repli sur soi, c'est la porte ouverte aux communautarismes et aux corporatismes. Plus que de s'attaquer aux grands idéaux républicains, il porte atteinte au concept même de civilisation. C'est une régression qui éloigne les citoyens des grands principes et des grandes aventures collectives pour les enfermer dans leurs préoccupations quotidiennes et souvent superficielles. La société de consommation ou plus exactement la "société de marché" comme l'appelle Lionel Jospin, bien que consolidant les économies, détruit peu à peu les fondements des sociétés, à commencer par la culture. S'intéresser à la vie publique, c'est un moyen de rejetter cette évolution, d'affirmer que ce qui donne un sens à sa vie, se sont les autres (et pas seulement ses proches). Se consacrer à la politique, c'est faire passer le souci du monde avant le souci de soi. Ce projet idéaliste - certains diront utopiste - peut être une réponse à la crise de sens qui sévit actuellement dans le monde occidental.

La France est en cela un pays admirable : sa passion pour la politique, éclatante lors des dernières élections, grandit le peuple Français. Pendant des semaines voire des mois, les gens ont débattu, discuté des candidats et des programmes, ils ont réfléchi sur ce qui constituait l'identité nationale. Même si la plupart des citoyens ne connaissaient ou ne comprenaient que partiellement les détails des propositions avancées par les candidats, ils avaient, dans leur immense majorité, le sentiment que quelque chose d'important se jouait pour le pays. Leur vote a été beaucoup plus guidé par ce qu'ils pensaient être juste que par la recherche d'intérêts directs liés à la victoire d'un camp ou d'un autre. Le seul regret que l'on peut exprimer est que cette campagne se soit focalisée essentiellement sur des sujets économiques et sociaux domestiques et se soit détournée des questions internationales.

La politique, comme la science, la philosophie ou les arts participe du processus de civilisation. Elle est à ce titre éminemment respectable et elle exige, de la part de ceux qui l'exerce, discernement et responsabilité. Selon Aristote, "La fin de la Politique sera le bien proprement humain", cette perspective me semble plus constructive que la vision Rousseauiste d'"éradication du mal".

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