15 janvier 2011

Les Français n’ont pas besoin de cours d’économie, mais de physique statistique !

En photo : Ludwig Boltzmann

On entend souvent dire que les Français sont nuls en économie, et que cela explique leur approche très simpliste des problèmes politiques. C’est en partie vrai, mais tout dépend du contenu de ce qu’on appelle science économique : s’agit-il des théories microéconomiques qui sont souvent plus séduisantes que pertinentes ? S’agit-il des systèmes d’équations macroéconomiques qui donnent l’impression qu’un pilotage limité à quelques variables est possible ? A mon sens, le problème de fond n’est pas là, et le renforcement des cours d’économie ne changerait pas grand-chose à la culture politique des Français. En revanche, chacun gagnerait à apprendre un peu de physique statistique comme je vais tâcher de le montrer dans cet article.

Prenons deux exemples classiques de physique statistique : le comportement des gaz parfaits et le phénomène de l’aimantation (ou ferromagnétisme). Dans le premier cas, la physique statistique nous apprend comment passer de caractéristiques microscopiques, c’est-à-dire propres à chaque molécule de gaz (vitesse, position), à des propriétés macroscopiques (température, pression). C’est la même chose dans le second cas, avec le modèle d’Ising qui explique comment passer des moments magnétiques de chaque atome composant un métal à l’aimantation de ce même métal. Ce modèle est également utilisé pour expliquer les phénomènes de changements de phase. Ce dernier exemple est en fait beaucoup plus intéressant que le premier car le comportement individuel d’un atome n’est pas indépendant de celui de ses voisins, comme dans le cas des gaz parfaits, mais il est influencé par le champ magnétique induit par les atomes voisins.

Pour résoudre ce problème, on fait souvent l’approximation dite « du champ moyen », c’est-à-dire qu’on isole un atome et que l’on considère connu le champ généré par l’ensemble des autres atomes. Cela permet d’étudier le comportement de l’atome isolé, et comme tous les atomes sont considérés comme identiques ici, on peut en déduire un champ moyen : il suffit alors d’itérer suffisamment de fois pour que le champ moyen postulé en entrée soit identique au champ obtenu en sortie.

Cela peut sembler très technique : on touche pourtant là au cœur des problèmes politiques, économiques et sociaux. En effet, comme la physique statistique, ces sciences sociales doivent penser l’ « émergence », c’est-à-dire l’apparition de propriétés macros, que nous pouvons appeler des faits sociaux (chômage, réussite scolaire, ghettoïsation, croissance économique…) à partir de comportements individuels. Cette émergence ne doit absolument pas être comprise comme une causalité : bien souvent, les maux de la société, que la politique a pour tâche de résoudre, ne sont pas voulus par certains acteurs économiques. Un exemple assez connu est celui de la ghettoïsation : on peut montrer qu’une segmentation ethnique peut s’opérer sans qu’il n’y ait d’hostilité à vivre ensemble, il suffit pour cela de postuler une légère préférence pour son « semblable ». Etudier ces faits sociaux, c'est en fait étudier l'interaction permanente qui existe entre chaque individu et la société, qui n'est jamais que le "champ moyen" généré par les autres individus.

Prenons l'exemple de la méritocratie que j'ai évoqué rapidement dans mon dernier article : pour qu'une société "fonctionne", il faut nécessairement que les individus aient l'impression qu'ils seront, d'une manière ou d'une autre, payés en retour de leurs efforts. Un grand problème politique est donc de faire en sorte que l'organisation de la société permette à chaque individu de se réaliser, c'est-à-dire d'être en position de responsabilité sur le cours de son existence. Sans cela, la croyance méritocratique, toute nécessaire qu'elle soit, finira par s'estomper. A l'inverse, une société dotée d'une bonne organisation dans laquelle les individus ont l'impression que leurs efforts ne sont pas récompensés finira également par s'écrouler. C'est donc bien l'interaction entre une croyance intersubjective et une forme d'organisation sociale qui est le phénomène majeur que la politique doit prendre en compte. Pour cela les responsables politiques doivent "faire" (améliorer l'organisation sociale) mais également "dire" (pour ancrer cette croyance intersubjective).

Il y a au fond deux grandes conceptions politiques possibles : pour la première, que j’appellerai moralisatrice, les maux sociaux résultent de maux individuels qu’il convient d’éradiquer. Ainsi les difficultés d’intégration des populations immigrées trouvent toute leur cause dans l’intolérance et la xénophobie des individus de la société d’accueil, le chômage s’explique par l’appât du gain des chefs d’entreprises, la crise des subprimes vient de la recherche toujours plus grande du profit chez les banquiers américains,… Face à cette conception moralisatrice, il y a une conception politique qui se rapproche de la physique statistique, selon laquelle les maux sociaux émergent sans qu’ils soient nécessairement voulus par une partie des individus. Sans nier l’existence du mal individuel, il me semble qu’il joue au final un rôle assez limités sur les problèmes de la société. Pour le dire autrement, même si tout le monde était altruiste et de bonne fois, il y aurait toujours l’essentiel des problèmes sociaux à résoudre.

Il y a donc un clivage radical entre l’approche « moralisatrice » et l’autre que l’on peut qualifier de « complexe ». Ce clivage m’apparaît comme beaucoup plus important que le clivage droite/gauche qui est sans arrêt mis en avant. En effet, dans le premier cas, le projet politique consiste à identifier les « mauvais individus » et à les empêcher de nuire, c’est-à-dire à faire triompher le bien sur le mal. Dans le second cas, la politique consiste à comprendre et à réparer la mécanique sociale : l’homme politique passe du rôle de procureur à celui d’ingénieur.

Chacun des lecteurs de ce blog comprendra que c’est cette approche « complexe » que je m’efforce de porter au fil de mes articles. Elle me semble aujourd’hui minoritaire dans le discours politique, pour deux raisons principales : d’une part parce que l’approche moralisatrice est beaucoup plus accessible que l’approche complexe, ce qui permet aux populistes de tous poils de convaincre les foules et d’autre part parce que les programmes politiques des grandes formations politiques se sont considérablement rapprochés au fil des années à travers la construction européenne, la chute du communisme et la mondialisation, et que les partis (surtout à gauche) cherchent à se distinguer sur le plan moral, en profitant des diverses « affaires » qui peuvent secouer l’autre camp.

Il n’y a donc qu’une solution pour apaiser et rehausser le débat politique en France : des cours de physique statistique obligatoires pour tous !

02 janvier 2011

Racisme, culturalisme, xénophobie

On le sait, certains sujets sont tellement glissants qu’on préfère éviter de les aborder. Cette stratégie d’évitement conduit inéluctablement à un décalage croissant entre le discours et la réalité, à force de détours sémantiques et d’euphémisations. Il en est ainsi de tout ce qui touche à la diversité culturelle et ethnique. Disons-le tout de suite, le tabou qui entoure ces questions a de très bonnes raisons d’être : en effet, le XXème siècle nous a appris jusqu’à quelles atrocités la stigmatisation de l’ « autre » pouvait conduire, et il serait naïf de croire qu’en la matière l’Histoire a servi de leçon. A l’inverse, agiter le spectre des années trente dès lors que le sujet est abordé est aussi absurde que contre-productif.

Le problème qui me semble se poser aujourd’hui, c’est que l’antiracisme est sorti de son lit, c’est-à-dire que le discours qu’il véhicule dépasse son objet direct. En plus de dénoncer avec raison l’inégalité des hommes selon leur origine ethnique, l’antiracisme d’aujourd’hui tend à nier l’influence que la culture d’origine peut avoir sur un individu et fait reposer l’ensemble des difficultés de coexistence multiculturelle sur la discrimination dont les minorités seraient victimes. Dès lors, un amalgame se créé entre racisme, xénophobie et culturalisme. Il me semble nécessaire de remettre un peu d’ordre dans ces notions et de préciser ce qui me semble être le discours à tenir sur ces sujets.

1. L’origine raciale ne joue qu’un rôle marginal dans le comportement et les facultés des individus

Tel me semble être le principal axiome de l’antiracisme. Pour le dire autrement, l’homme est avant tout un être épigénétique c’est-à-dire que son identité est d’abord intellectuelle, sociale et culturelle. Bien entendu, on ne peut pas dire que l’origine raciale ne joue aucun rôle sur les facultés d’un individu (il suffit de penser aux performances sportives par exemple ou aux différences manifestes entre les hommes et les femmes), il s’agit juste de dire qu’entre le développement pré-natal (génétique et plus généralement biologique) et le développement post-natal (éducatif, social, culturel), c’est le second qui est le plus déterminant sur la construction de l’individu. Cette caractéristique est certainement propre aux espèces évoluées qui se soustraient peu à peu de la sélection Darwinienne en remplaçant le milieu extérieur biologique par un milieu extérieur social et culturel.

Il faut souligner que cette thèse minimale de l’antiracisme ne va pas de soi. La domination du monde à partir du XVème siècle par les Européens a fait naître dans l’esprit de beaucoup de personnes (aujourd’hui encore) l’idée que l’homme blanc était supérieur aux autres races. Il est utile de lire l’ouvrage génial de Jared Diamond « Guns, Germs and Steel » pour la chasser définitivement de son esprit. Ce livre qui tente d’expliquer les réussites diverses des civilisations depuis la dernière ère glaciaire commence par une interpellation crue : celui qui n’arrive pas à apporter une explication au fait que les aborigènes n’ont pas réussi à construire une civilisation développée alors que les européens, en s’installant sur la même terre y sont parvenus ne peut pas exclure la thèse raciste. Tout l’objet du livre est précisément d’apporter une réponse argumentée, ce qui en fait un puissant plaidoyer antiraciste.

Pour résumer, il explique que des civilisations séparées (ce qui était le cas pour faire simple de l’Eurasie+Afrique du Nord, de l’Amérique, de l’Afrique sub-saharienne et des multiples îles de l’Océanie avant que ne se développe la navigation hauturière) n’ont aucune raison d’avancer au même rythme puisqu’elles sont soumises à des contingences multiples et que dans ces conditions, ce sont les zones les plus peuplées, les plus vastes et dotées des espèces animales et végétales les plus variées qui ont le plus d’atouts. Diamond explique qu’à ces critères il faut en ajouter un autre : l’orientation Est-Ouest de l’Eurasie qui facilite le développement des espèces végétales les plus productives (puisqu’il se fait à iso-latitude) alors que l’Amérique comme l’Afrique sub-saharienne sont orientées Nord-Sud.

2. Les individus ne sont pas déterminés par leur environnement

Ce second axiome, qui a une portée plus humaniste qu’antiraciste, consiste à reconnaître la prépondérance du libre-arbitre sur les influences extérieures qui peuvent s’exercer sur l’individu et sur lesquelles nous aurons l’occasion de revenir. Pour le dire autrement, l’individu prime sur le groupe, qu’il soit social, ethnique, politique, sexuel ou culturel. Si cela ne doit pas conduire à une vision totalement individualiste de la société, cela exclut de fait les conceptions trop holistes qui font primer la communauté, la famille, la classe sociale, l’orientation ou le genre sexuel sur les individus qui les composent.

De ce fait, tous les discours (essentialistes) qui prétendent que « les Noirs sont comme ci » ou « les pauvres sont comme ça » doivent être dénoncés avec force, de même que ceux qui prétendraient définir comment sont les Blancs ou les riches. Si les questions politiques et économiques sont si complexes, c’est en grande partie parce que les individus ne sont pas réductibles à de grands groupes homogènes qui aimeraient, feraient et penseraient la même chose.

Le discours politique doit également mettre en valeur la volonté individuelle face à toute forme de détermination. Ne pas le faire pourrait conforter certains individus dans une forme d’irresponsabilité en rejetant tous leurs problèmes individuels sur la société, ce qui constitue un équilibre instable. La croyance dans la volonté individuelle et dans le mérite personnel est un élément de base de la société : c’est une nécessité plus qu’un constat.

3. En plus de l’influence sociale, il existe une influence culturelle

Si l’individu n’est pas déterminé par son environnement (axiome 2), il peut être influencé par lui. Cette influence est même prépondérante sur l’influence génétique ou raciale (axiome 1). Mais de quelles influences parle-t-on ? Très souvent, on se cantonne à l’influence sociale : effectivement, la segmentation entre chômeurs, retraités, cadres, ouvriers et techniciens est souvent très utile pour saisir certains faits sociaux. Les taux de réussite scolaire et les taux de délinquance, pour ne citer que deux exemples abondamment commentés, diffèrent ainsi significativement suivant ces groupes sociaux. Cette influence sociale est reconnue par tous, le seul débat, qui distingue peut-être entre la gauche et la droite, concerne le poids de cette influence par rapport à la volonté individuelle.

En revanche, les choses se compliquent dès que l’on parle d’influence culturelle, et l’accusation de racisme n’est jamais très loin. C’est pourtant ce que vient de mettre en évidence Hugues Lagrange, sociologue au-dessus de tout soupçon (de gauche, qui a travaillé dans les quartiers sensibles pendant une dizaine d’année, opposé au durcissement de la politique de l’immigration…) dans son essai « Le déni des cultures » qui a fait couler beaucoup d’encre. Si l’on résume la partie de son ouvrage qui concerne la délinquance, il est fait état qu’au sein des mêmes classes sociales, la proportion d’auteurs d’actes de délinquance est plus élevée chez les Maghrébins, les Turcs et les Noirs hors Sahel que chez les Français autochtones et les Européens et qu’elle est encore plus élevée chez les Sahéliens.

Il n’est pas question de stigmatiser telle ou telle communauté dans cette étude mais plutôt de montrer comment des différences culturelles (nombre d’enfants par femme, place de la femme dans le foyer, structure familiale…) peuvent être des facteurs explicatifs, en plus de la seule analyse par classe sociale, de phénomènes sociaux comme la réussite à l’école ou la délinquance. Cette part explicative est d’autant plus importante que la culture d’origine et la culture du pays d’accueil diffèrent et elle perdure d’autant plus que se constituent des ghettos urbains où la proportions d’immigrés provenant de la même zone géographique est très importante.

Au-delà des informations que cette étude révèle il faut retenir que les cultures existent et qu’elles influencent, à travers une langue, une religion dominante, une structure familiale typique,… le comportement des individus, au même titre que la condition sociale. Une simple introspection permet de soutenir cette thèse pourtant si contestée par nombre de sociologues : est-ce que j’aime l’opéra parce que j’appartiens à la classe des cadres ou parce que je suis de culture française ? Vraisemblablement un peu des deux, explications auxquelles il faut bien évidemment ajouter ma propre inclination personnelle car beaucoup de cadres français autochtones n’aiment pas l’opéra.

Dès lors il faut reconnaître que les cultures ne se mélangent pas sans efforts, que leur coexistence peut faire naître des frictions qui ne peuvent être intégralement expliquées par l’intolérance de la culture d’accueil.

4. Les influences sociales et culturelles ne sont pas stables dans le temps

Il faut aller plus loin dans l’analyse, jusqu’ici nous avons dit que le comportement et les facultés d’un individu s’expliquent principalement par sa volonté personnelle ainsi que par des influences sociales et culturelles et assez peu par sa condition biologique. Mais il ne faut pas prendre les influences sociales et culturelles comme des données intangibles qui ne seraient pas susceptibles d’évoluer dans le temps. Les cultures, comme les structures sociales, sont vivantes, elles évoluent, parfois de concert, parfois indépendamment l’une de l’autre. Ces évolutions peuvent être positives comme négatives et ne sont pas guidées par un quelconque « sens de l’Histoire » qui fournirait une forme de méta-explication.

Pour prendre un exemple précis tiré de l’étude d’Hugues Lagrange, rien ne dit que le taux de fécondité des femmes d’origine Sahélienne (aujourd’hui proche de 7) ne baissera pas pour rejoindre un niveau comparable aux cultures européennes ou maghrébines (plus proche de 2), ce qui aura des répercussions sur les structures familiales, la réussite scolaire des enfants et les taux de délinquance observés. Notons également que rien ne dit que la culture des immigrés Sahéliens en France ne se distingue pas progressivement de la culture d’origine Sahélienne sans nécessairement se fondre dans la culture française.

5. La xénophobie en Europe

Si le phénomène récent marquant dans les cultures musulmanes a été un durcissement réactionnaire, face à une certaine modernité occidentale, l’Europe de ces dernières années a été le théâtre d’une montée progressive de la xénophobie, que l’on peut constater avec l’augmentation des scores des formations dites d’extrême droite. Je pense que cette xénophobie a très peu à voir avec le racisme tel que défini dans cet article. La xénophobie, c’est la peur de l’étranger ou également la peur d’une culture différente, ce n’est pas un sentiment de supériorité raciale. Trois tendances de fond me semblent expliquer cette situation.

Tout d’abord, la globalisation s’est traduite par une intensification des phénomènes migratoires du Sud vers le Nord : l’Europe fait donc face à une augmentation significative sur les dernières décennies du nombre de ses habitants de culture non-autochtones.

Ensuite, contrairement à ce que beaucoup attendaient, la globalisation ne se résume pas à une occidentalisation du monde : si le modèle économique libéral et le mode de vie occidental tendent à se répandre sur toute la surface de la planète, on remarque que sur de très nombreux points, les différences culturelles à l’échelle mondiale ne vont pas en s’effaçant. On pourrait même dire que certaines formes de radicalisation sont interprétables comme une réaction à cette culture occidentale mondialisée.

Enfin, la civilisation européenne n’est plus sûre d’elle-même : elle souffre du phénomène de rattrapage économique des pays émergents (rattrapage qu’elle avait elle-même connu après la seconde guerre mondiale) qui vient diluer sa richesse et son influence. On ne demeure pas la zone du monde avec la croissance la plus faible pendant dix ans sans conséquences. Ce sentiment de déclin rend plus difficile l’intégration de cultures différentes, non pas en raison d’une haine de l’étranger mais parce les européens ne sont plus sûrs de la force de leurs valeurs et que certains craignent qu’elles ne soient pas de taille à lutter contre les valeurs des cultures arrivantes. C’est ce qui explique selon moi le durcissement laïc observé, principalement en France, ces dernières années : il s’agit de défendre des valeurs fortes (au risque de bomber un peu trop le torse parfois) face à l’Islam dont on craint la force (en particulier depuis 2001).

Pour résumer, l’Europe doit intégrer un nombre important de personnes dont la culture d’origine ne se rapproche pas nécessairement de la culture européenne, tout en affrontant une crise civilisationnelle qui diminue la confiance qu’elle a en ses propres valeurs. Il y a là tous les ingrédients pour expliquer la montée xénophobe en Europe. Comme ces causes sont profondes, il est probable que ce phénomène le soit lui aussi, et qu’il ne suffira pas de dire aux Européens qu’ils votent mal ou qu’ils sont intolérants pour le résorber. Ce phénomène se distingue également de ce qu’on a appelé auparavant l’extrême-droite et qui était avant tout un mouvement conservateur et populiste, assez proche du mouvement des Tea Party aux USA. Cette fois, c’est le caractère réactionnaire des cultures immigrées qui est dénoncé, au nom d’une certaine culture européenne libérale et laïque (un exemple est le parcours politique de Pim Fortuyn aux Pays-Bas).

Conclusion

L’antiracisme, en tant que négation des différences de facultés ou de comportements des individus en fonction de leur origine raciale, est une grande idée qu’il faut à tout prix défendre. Elle ne saurait cependant se confondre avec un anticulturalisme qui nierait l’influence que la culture d’origine peut avoir sur le comportement individuel. Ces influences culturelles, au même titre que les influences sociales, évoluent dans le temps, elles sont en particulier affectées par le grand phénomène de notre époque : la globalisation. Celle-ci rapproche géographiquement ces cultures les unes des autres sans en faciliter pour autant la coexistence. C’est fort de ce constat que des politiques d’intégration doivent être pensées en Europe (tâche délicate à laquelle je ne me suis pas attelé dans cet article) et non pas en se focalisant sur une intolérance de type raciste qui existerait en soi et qui déboucherait sur une montée des discriminations. S’arrêter à l’intolérance, c’est refuser de remonter toute la chaîne causale et en quelque sorte refuser de résoudre le problème que l’on dénonce.