27 avril 2008

La théorie du complot


Relancée bien malgré elle par Marion Cotillard, la théorie du complot est une constante dans nos société modernes. Bien entendu elle peut prendre plusieurs formes, la plus radicale consistant à remettre en cause toute vérité officielle, comme l'origine des attentats du 11 septembre ou la réalité des premiers pas de l'homme sur la Lune, tandis que d'autres formes plus douces mettent en avant une hyper-organisation de certaines structures institutionnelles (Etats, multinationales,...), qui sont censées tout connaître et tout savoir immédiatement, dans ce cas, la théorie du complot s'apparente plutôt au mythe de Big Brother.

Dans un article récent du Monde, le philosophe français Robert Redecker explique les ressorts psychologiques à l'œuvre dans les multiples formes de la théorie du complot d'une manière tout à fait convaincante : "On devine les avantages narcissiques de la croyance dans cette théorie : son adepte s'épanouit dans le sentiment de détenir un secret d'une extrême importance. Il jouit d'en savoir plus que les plus grands savants. Il n'a pas eu à produire d'efforts pour s'élever au-dessus des sommités, il lui a suffi d'appliquer une disposition d'esprit : le rejet de toute vérité affirmée officiellement. Dans cette négation triomphe le ressentiment contre les élites de la connaissance et se déploie une figure contemporaine de l'anti-intellectualisme. Plus gratifiant encore : l'adepte de cette théorie éprouve l'ivresse d'avoir réussi à déjouer un piège collectif, dans lequel l'humanité ordinaire tombe. Il se découvre plus malin que le conspirateur qui, sous des guises diverses, trompe l'humanité depuis des siècles !". Mais cette dimension narcissique, bien qu'essentielle, n'est pas la seule à l'œuvre pour expliquer l'engouement des masses pour la théorie du complot.

En effet, plus qu'une doctrine, la théorie du complot est un substitut à la religion. Ayant renoncé à donner un sens au Monde par la volonté de Dieu, l'homme moderne se retrouve sans repères, perdu au milieu d'un monde absurde complètement dénué de fins. Cette situation déroutante conduit certains au nihilisme, mais d'autres ne peuvent se résoudre à une telle absence de sens. Ils cherchent ailleurs une autorité qui redonnerait de la cohérence à ce qu'ils voient et à ce qu'ils vivent : si ce n'est plus Dieu qui régit le monde, alors se sont les hommes. Mais pas tous les hommes, car peu de gens ont l'impression, dans leur vie quotidienne, de présider aux destinées du monde, seulement une poignée, une oligarchie planétaire qui tire les ficelles, voit tout, entend tout et sait tout. Cette "élite de l'ombre" est aussi bien politique, économique que religieuse, elle chapeaute tous les lieux de pouvoirs. Bien entendu, il n'est pas nécessaire, pour être un adepte de la théorie du complot, de supposer l'unité de cette oligarchie, elle peut se répartir en groupes séparés qui ont des zones d'influences distinctes. L'intérêt de cette démarche est avant tout de retrouver du sens, ce qui conduit à une situation paradoxale : plutôt que d'inquiéter, la théorie du complot rassure. Qu'importe que le monde soit dirigé par des personnes peu scrupuleuses, au moins y'a-t-il quelqu'un aux commandes, semblent se réjouir inconsciemment les adeptes du complot.

A un degré moindre, cette disposition d'esprit conduit l'immense majorité des individus à surestimer l'organisation et le professionnalisme des institutions. Et pour cause, l'une des raisons d'être de ces institutions est d'apparaître infaillibles, nécessaires, pour ne pas dire évidentes aux yeux des citoyens. Pourtant, dès qu'on s'approche un peu, le décor en carton pâte ne fait plus illusion : aussi prestigieuses soient-elles, les institutions sont avant tout des organisations humaines, c'est-à-dire faillibles. Dans la vie politique, cela se traduit par une obsession de la signification : les observateurs politiques tentent d'interpréter et de donner un sens à tous les actes du pouvoir en place. On parle de dysfonctionnements ou de couacs, pour tout de suite insinuer qu'il s'agit de manœuvres orchestrées par le pouvoir lui-même, le Président ne cite pas le nom de son Premier Ministre lors d'un discours et on évoque une crise au sommet de l'Etat. Bref, on ne reconnaît pas au pouvoir en général, qu'il soit politique ou économique, le droit de commettre des erreurs ou de se tromper.

La réalité est bien différente, elle est beaucoup plus micro que macro. Le monde est devenu tellement complexe qu'il oblige à l'hyper-spécialisation des tâches, plus personne ne contrôle tout, ni le PDG d'une grande entreprise, ni un ministre, pas même un directeur de recherches. Qui plus est, les nouvelles technologies ont accrues de manière considérable (parfois excessive) la transparence : pour reprendre l'adage populaire, grâce à Internet "tout finit par se savoir". L'idée, pour les puissants, de travestir la réalité pour qu'elle apparaisse aux foules telle qu'ils la souhaitent plutôt que telle qu'elle est, s'avère de plus en plus périlleuse à mettre en œuvre.

Ce qu'il faut accepter, c'est la contingence du monde. Reconnaître que ce qui se joue devant nos yeux n'est pas la représentation d'un pièce écrite à l'avance mais bien la confrontation des volontés, des intérêts et des talents des individus. En un mot, il faut pousser plus loin le désenchantement du monde amorcé par le reflux des interprétations religieuses.

17 avril 2008

Couacs ou pas couacs


A en croire la presse nationale, le gouvernement vient de vivre une de ses semaines les plus difficiles depuis son installation. La succession de ce que le microcosme a choisi de qualifier de « couacs » a donné une image d’improvisation et de dissensions au sein de la majorité. On a donc ressorti tous les éditorialistes et journalistes politiques qui font la fierté de notre pays pour qu’ils puissent exprimer toute leur dimension sur les plateaux de télévision. Untel y a vu le signe de tensions croissantes entre le Président de la République et son Premier Ministre, un autre a cru déceler la révolte des parlementaires UMP face à certains ministres et un dernier a pointé les rivalités qui existent au sein même du gouvernement, en vue de remplacer un François Fillon annoncé sur le départ dès 2009.

A croire que la vie politique de notre pays se résume au jeu politicien, avec tout ce qu’il suppose de tactique et de coups bas. Ce n’est plus Le Monde qui donne le ton des débats, c’est le Canard enchaîné, ce ne sont plus les journaux télévisés qui informent les citoyens, ce sont les Guignols de l’info. Loin de remettre en cause la place de la presse satirique, qui est un élément essentiel de la liberté d’opinion, il s’agit de se demander où est passé le journalisme politique. Plus que la presse, c’est toute l’opinion française qui se passionne pour la politique politicienne : les 5 millions de téléspectateurs quotidiens des guignols, dont je fais partie, connaissent tout de la rivalité entre Xavier Bertrand et François Fillon, ils se délectent des stratégies des éléphants du PS, se demandent comment Bertrand va faire pour écarter Ségolène en s’appuyant sur Martine sans trop se fâcher avec François. Bien entendu, les Tartuffes ne sont jamais très loin pour s’indigner des querelles de personnes qui prennent trop de place dans la vie politique.

Pour revenir à notre sujet, il est donc désormais établi que le gouvernement a accumulé les gaffes, les couacs et autres erreurs de communication. Peu importe qu’il s’agisse des OGM, de la carte famille nombreuse de la SNCF, du boycott de la cérémonie d’ouverture des Jeux de Pékin ou de la diminution du nombre de postes dans l’Education Nationale, ces sujets ne semblent pas exister par eux-mêmes, ils ne sont là que pour servir la thèse du « couac » généralisé. On ne demande plus à un ministre si ce qu’il propose est juste, vrai ou efficace, on lui demande de juger de la qualité de la communication du gouvernement. On entre alors dans un cycle sans fin, complètement nombriliste, fermé sur lui-même et autoréalisateur : la démocratie d’opinion joue à plein puisque les sondages d’opinion sur telle ou telle mesure gouvernemental deviennent des arguments structurants du débat. Prenons donc le temps de sortir de cette bulle et d’analyser brièvement chacun des cas évoqué dans sa spécificité.

La question des OGM est complexe et suscite des avis très contrastés. Derrière elle, se cache un certain rapport à la nature et à la science et des interrogations quasi-philosophiques. Faut-il, en effet, que certains parlementaires aient les convictions chevillées au corps pour prendre le risque de froisser une opinion très majoritairement hostile aux OGM. Il est parfaitement sain et normal qu’un tel débat de principe ait lieu au Parlement et qu’il déclenche les passions. Telle n’est pas l’image renvoyée de ce débat par les médias : certains parlementaires de la majorité sont accusés d’être achetés et à la solde des grands semenciers comme Monsanto, on leur refuse le droit d’avoir une opinion indépendante. Les commentateurs s’indignent : les parlementaires, élus du peuple, osent remettre en cause le travail des représentants auto-désignés des associations qui ont participé au Grenelle de l’environnement ! Quel affront pour la démocratie, comment pouvons nous encore accepter d’être dirigés par cette armée de réactionnaires ? Mais soudain surgit la belle secrétaire d’Etat Nathalie Kosciusko-Morizet, qui a défaut de se faire un nom aura profité de l’occasion pour se faire un acronyme, et qui dit tout haut ce que le peuple pense tout bas, à savoir que les parlementaires UMP sont des lâches. NKM aurait-elle du démissionner au-delà de ses excuses, a-t-elle eu raison sur le fond du dossier ? Peu importe puisque 78% des Français ont approuvé son comportement selon un sondage, elle au moins a compris que la démocratie représentative ne pesait plus grand-chose face à la démocratie d’opinion et qu’un ministre devait davantage chercher la confiance des Français que celle des parlementaires. Après l’alliance entre le Roi et le Tiers-Etat pour diminuer l’importance de la noblesse au XVIIème et XVIIIème siècle, le Grenelle nous prouve qu’on assiste à une alliance d’un nouveau genre entre l’exécutif et l’opinion publique contre les parlementaires, symboles d’un autre âge, celui de la démocratie représentative. Mais si on fait le point sur le fond du dossier, peut-on dire que les Français sont plus éclairés sur la question des OGM après ces semaines de débats intenses ? Certes tout le monde connaît désormais NKM, le sénateur Legrand, le député Grosdidier ou le député Chassaigne, mais qui ose, par exemple, pousser le débat plus loin en faisant, par exemple, un lien entre le développement des OGM comme réponse face à la crise alimentaire qui touche le monde actuellement. Vu du tiers-monde, nos débats interminables pour savoir quelle distance devra séparer un agriculteur utilisant des OGM d’un producteur de bio doivent sembler bien dérisoires.

L’ « affaire » de la carte famille nombreuse de la SNCF est également un cas d’école de faux -couac qui masque un vrai débat. Même s’il faut reconnaître que certains ministres ont affiché des positions parfois contradictoires, le travail de désinformation a atteint des sommets sur ce sujet. C’est le syndrome du téléphone arabe : un rapport (celui de la Revue Générale des Politiques Publiques) comprend une mesure qui prévoit de supprimer la subvention de l’Etat à la SNCF pour cette carte familiale, la presse titre que le gouvernement veut supprimer cette carte, Nicolas Sarkozy choisit de contourner la difficulté en décidant de maintenir la subvention mais en demandant une augmentation comparable du dividende versé par la SNCF redevenue bénéficiaire à l’Etat son unique actionnaire, l’opinion estime que le Président a reculé. Comment peut-on en arriver à un tel dialogue de sourd ? Alors qu’ils sont là pour clarifier les débats, les médias semblent tout faire pour favoriser la confusion. L’idée de base du gouvernement n’est pourtant pas totalement stupide : faire payer une entreprise bénéficiaire, fût-elle publique, pour économiser des dépenses publiques, c’est-à-dire des impôts, même Olivier Besancenot pourrait se retrouver dans un tel programme.

La suppression de postes d’enseignants dans le secondaire souffre également de la confrontation entre l’opinion et la vérité. Il y a d’abord une querelle sur les chiffres un peu surréaliste : le ministre de l’Education Nationale explique que le taux d’encadrement, c’est-à-dire le nombre d’élèves par professeur, restera constant par rapport à l’année précédent, les lycéens et les syndicats lui répondent qu’on réduit le nombre d’enseignant donc la qualité du service public de l’éducation. En décorrélant ainsi le nombre d’enseignants et le nombre d’élève, on pourrait aboutir à la conclusion absurde que le système éducatif français est six fois meilleur que le belge car nous avons environ six fois plus d’enseignants. Sur ce point très précis, il n’est pas question d’opinion, et pour les journalistes, il ne suffit pas de relayer les points de vue des uns et des autres en les affectant d’un poids égal : l’affirmation du ministre est soit vraie, soit fausse, tous les chiffres sont disponibles, qu’attend-on pour mettre fin à cette querelle ? Rares sont les questions politiques aussi simples, si on ne parvient pas à ce mettre d’accord à leur sujet, cela augure mal de ce qui se passera pour les autres débats plus complexes.

Pour finir, parlons d’un « vrai » couac, celui, permanent, de la diplomatie française depuis la Présidentielle, avec, dans le rôle principal, la secrétaire d’Etat aux Droits de l’Homme Rama Yade. Au début, on pouvait approuver voir s’émouvoir des prises de positions courageuses de la jeune ministre, en particulier lors de la venue du colonel Khadafi en France, mais désormais le scénario répétitif d’un pas en avant suivi d’un pas en arrière finit par lasser. A tel point qu’on en vient à se demander si on n’assiste pas à une pantomyne et à un spectacle bien réglé : d’abord les protestations courageuses la main sur le cœur de Rama Yade, puis un démenti de son ministre de tutelle Bernard Kouchner et enfin la secrétaire d’Etat qui revient sur ses propos en disant qu’ils ont été mal retranscrits. Une telle pratique de la politique, qui s’affranchit de toute responsabilité, est détestable, elle s’inscrit pour partie dans une tentative de présidentialisation du régime où les ministres n’ont plus réellement de pouvoir et en sont réduits à se donner de l’importance au travers de coups d’éclats médiatiques.

Cessons une fois pour toute de ramener tous les problèmes politiques à des questions de méthode ou de communication, reconnaissons que ces sujets existent avant tout par eux-mêmes et méritent un examen approfondi. Alors discutons des OGM, de la réforme de l’Etat, de la politique de l’Education Nationale ou de la politique étrangère plutôt que d’attendre les faux-pas du gouvernements et les sempiternels couacs.

05 avril 2008

La rigueur


Le mot est dans toutes les bouches, dans toutes les têtes, il hante le microcosme, horrifie la majorité et sert l'opposition : le gouvernement va-t-il oui ou non mener une politique de rigueur ? Ce débat est assez surréaliste dans la mesure où cette notion de "rigueur" n'est pas clairement définie et que les différents acteurs politiques ou médiatiques n'y voient pas le même sens. Il rejoint la longue liste d'objets politiques non-identifiés avec la rupture, les réformes ou encore le changement. Il est intéressant de voir comment l'essentiel des débats de la vie politique française, dans chacun de ces cas, peut se faire autour d'un concept dont aucune définition précise n'est donnée.

Le terme de "rigueur" est en effet polysémique, il fait référence à la politique menée par Raymond Barre après le premier choc pétrolier mais surtout au fameux "tournant de la rigueur" du gouvernement Mauroy en mars 1983. Dans ce dernier cas, il s'agissait de se concentrer sur la lutte contre l'inflation qui atteignait fréquemment les 15% à cette époque. Pour cela, il a fallu opter pour une très forte modération salariale et une politique monétaire aussi dure qu'elle devait être crédible. Aujourd'hui, la situation est complètement différente, même si l'on parle de retour de l'inflation, elle ne dépasse que péniblement les 3%, on est donc loin des niveaux des années 80, la politique monétaire, qui plus est, est désormais menée à l'échelon européen par la même personne qui dirigeait la Banque de France en 1983 : Jean-Claude Trichet, mais le pouvoir politique national n'a quasiment plus d'influence sur lui. La comparaison historique entre 1983 et 2008 n'est donc absolument pas pertinente, et il est absurde qu'elle soit brandie par le camp politique même qui a mené cette politique de rigueur sous François Mitterrand.

Dans la bouche d'autres responsables socialistes, en particulier François Hollande, la rigueur est assimilée à la réaction que le gouvernement va apporter face aux déséquilibre des finances publiques. Cette réaction peut prendre trois formes : une augmentation des impôts, une diminution des moyens de l'Etat ou un dérapage du déficit public. A partir de ce constat indiscutable, qui relève plus de la comptabilité que de l'analyse politique, il convient de faire le tri entre les différentes voies qui s'offrent au gouvernement. François Fillon a effectivement le choix entre deux politiques : la rigueur budgétaire ou le laxisme, opter pour la seconde solution, ce serait faire le choix de la facilité en léguant aux générations futures le poids de notre incurie, mais ce serait surtout affaiblir considérablement la France face à ses partenaires européens au moment où elle va prendre la présidence de l'Union Européenne.

Un homme politique responsable n'a en réalité que deux choix : augmenter les recettes de l'Etat ou diminuer ses dépenses, l'un n'excluant pas l'autre. L'opposition insiste sur la hausse des prélèvements obligatoires inévitable selon elle pour respecter les règles du pacte de stabilité, elle en profite pour dénoncer la mauvaise politique économique du gouvernement, plutôt que d'indiquer ses solutions à la crise actuelle. Dans sa campagne, Nicolas Sarkozy s'était engagé à baisser les prélèvements obligatoires pour les remettre dans la moyenne européenne, partant du constat que la fiscalité pèse exagérément sur la compétitivité économique de notre pays. La dégradation de la croissance due à la crise financière mondiale l'a contraint à revenir sur cet objectif, il faut s'en féliciter en même temps qu'on peut condamner les promesses intenables du candidat Sarkozy lors de sa campagne.

Si l'on ne laisse pas filer le déficit et qu'on choisit de stabiliser la pression fiscale, il ne reste plus qu'à diminuer les dépenses publiques. Cet objectif rejoint celui de l'optimisation de l'utilisation du produit des impôts : un euro dépensé par l'Etat doit être le plus efficace possible. C'est tout l'objet de la Revue Générale des Politiques Publiques, qui est de loin l'initiative la plus sérieuse qui a été prise depuis le début du quinquennat. Pour chaque politique ou dépense publique, il s'agit de s'interroger sur sa pertinence, son coût et les services les plus à même de la rendre. Ce vaste effort de rationalisation de l'Etat doit permettre selon Eric Woerth, ministre des Comptes Publics, d'économiser 7 à 8 milliards d'euros sur les trois années à venir. Ces économies augmenteront au fil des ans, en particulier via le non remplacement d'un fonctionnaire sur deux qui part à la retraite.

En même temps, on voit bien que les sommes annoncées ne sont pas à la hauteur de l'enjeu, si on les compare au 50 milliards de déficit public prévu pour l'an prochain ou même aux 15 milliards que coûteront le paquet fiscal en année pleine. Il faut donc poursuivre cet effort et surtout l'étendre aux dépenses publiques qui ne dépendent pas de l'Etat comme la protection sociale ou les collectivités territoriales. En ce sens, les réformes des retraites ou de l'assurance maladie, annoncées pour cette année seront très importantes. De même, une rationalisation de la décentralisation est aujourd'hui devenue inévitable, ce qu'avait justement souligné le rapport Attali en réclamant la suppression du département en temps que collectivité territoriale. Le gouvernement serait également bien inspiré de revenir sur tout ou partie du paquet fiscal, en particulier les déductions d'impôts pour l'achat d'une résidence principale et la suppression des droits de succession. Mais qu'on ne s'y trompe pas : contrairement à ce qu'affirme l'opposition, la situation économique du pays ne serait pas significativement différente si le paquet fiscal n'avait pas été voté, et on peut continuer à penser que les mesures sur les heures supplémentaires peuvent soutenir la demande et renforcer l'offre dans ces moments de turbulences économiques mondiales.

L'urgence, c'est le long terme, c'est-à-dire la compétitivité de notre pays, sa capacité à exporter pour financer notre modèle social, le gouvernement doit donc se concentrer sur le développement des PME, la relance de la recherche et de l'innovation et le renforcement de nos universités. Le maître-mot doit être le travail, en cela, le Revenu de Solidarité Active proposé par Martin Hirsch doit être autant soutenu que possible puisqu'il permet de sortir des trappes à inactivité et de récompenser chaque heure de travail supplémentaire. Les difficultés actuelles peuvent justifier un décalage dans le temps de la généralisation de ce processus mais certainement pas son abandon.

Réduire les dépenses improductives de l'Etat et relancer le travail par tous les moyens, je ne sais pas s'il s'agit d'une politique de "rigueur", je suis en revanche convaincu qu'il s'agit de la politique économique à suivre.