10 octobre 2010

Billet d'humeur

Le temps me manque depuis que je suis entré dans la "vie active", pour remplir les pages de ce blog. C'est, le temps, beaucoup plus que l'envie ou l'inspiration, qui m'en empêche. Je vais donc me livrer à un exercice inédit, celui du billet d'humeur sur les évènements récents de l'actualité.

1. Le débat sur les retraites

C'est toujours prodigieux de voir comment ce sujet est traité par les uns et par les autres : on invente des luttes politiques là où n'existe que la nécessité économique. Cela est dû à une grande confusion sur les conquêtes sociales (congés payés, retraite à 60 ans, réduction du temps de travail...), que l'on présente comme des conquêtes politiques alors qu'elles sont principalement des conquêtes économiques. En effet, c'est l'amélioration de la productivité qui permet les avancées sociales, qui ne sont que la juste récompense du travail accompli et pas un "cadeau" que le premier politicien de gauche viendrait promettre. Pour être plus précis, une conquête sociale, c'est la conjonction d'une bonne santé économique et d'une volonté politique. Le problème aujourd'hui, ce n'est pas la volonté politique mais la mauvaise santé économique, couplée à l'augmentation de l'espérance de vie. Nicolas Sarkozy le voudrait qu'il ne pourrait pas offrir le statu quo en matière de retraites, pas plus que ne le pourra Martine Aubry si elle revient au pouvoir.

Il est prodigieux, dans ces conditions de présenter les derniers aménagements de la réforme des retraites (sur les mères de famille nombreuse notamment), comme des choses que le gouvernement aurait "lâché", comme si il avait cela en réserve dans sa hotte. Il faut bien prendre conscience que tout aménagement coûte de l'argent et que c'est autant qu'on demandera aux autres travailleurs pour financer le système.

Le fond a toutefois été atteint avec l'annonce par les syndicats lycéens (un curieux concept) de rejoindre les salariés dans les manifestations. Si cela se produit, on aura la confirmation définitive que le niveau de formation de la jeunesse baisse : pire, qu'il chute à une vitesse vertigineuse. En effet, les lycéens en sont à ne plus comprendre où est leur intérêt objectif (que les générations qui les précèdent participent au maximum au financement du régime de retraite). Un calcul rapide indique pourtant qu'aucun d'entre eux ne sera touché par les mesures d'âge actuellement en discussion puisque leur durée de cotisation sera telle (41,5 annuités au minimum) qu'ils ne pourront pas partir plus tôt ! C'est fou ce que l'anti-sarkozysme peut conduire à faire...

2. La déchéance de la nationalité

Je préfère le dire tout de suite : je pense que l'élargissement de la déchéance de la nationalité qui vient d'être votée ne sert à rien, tant le nombre de cas concernés sera restreint. C'est du pur affichage politique. Mais il y a de quoi être choqué quand on entend qu'une telle mesure contrevient aux Droits de l'Homme, qu'elle salit l'image de la France ou qu'elle est d'inspiration xénophobe.
Il faut revenir un peu sur terre : on parle d'individus qui tuent un agent dépositaire de l'ordre public (policier, magistrat,...), ce qui n'est tout de même pas une mince affaire. Les discours enflammés des germanopratins sonnent terriblement faux sur ce sujet. Comment expliquer qu'ils ne se soient pas manifestés auparavant contre la disposition qui prévoit la déchéance de la nationalité aux terroristes et aux espions pour le compte d'une puissance étrangère ? Est-il plus grave de déchoir quelqu'un de sa nationalité parce qu'il a espionné ou parce qu'il a tué un juge ? Ce problème métaphysique est emblématique de notre pays qui adore ces débats de principes complètement déconnectés de la réalité.

3. Le remaniement ministériel

Les derniers sondages en attestent : Nicolas Sarkozy est mal parti pour 2012. Mais il reste maître du calendrier, ce qui est essentiel. Il est prématuré d'annoncer sa défaite. La prochaine échéance sera le remaniement ministériel et de l'UMP qui peut lui redonner une bouffée d'air pur s'il s'y prend correctement. Sa seule chance selon moi c'est de se mettre en retrait pendant une bonne année en laissant véritablement le prochain gouvernement gouverner. Cela lui permettra de prendre de la hauteur et de reconstituer petit à petit sa popularité. Le problème pour lui, c'est de trouver des "poids lourds" pour rentrer dans le prochain gouvernement, voici mes petites suggestions... Christine Lagarde nommée Ministre d'Etat, ministre des Affaires Etrangères et des négociations internationales (G20, G8). Alain Juppé ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Bruno Lemaire ministre de l'environnement, de l'énergie et du développement durable. François Baroin ministre de l'Intérieur. Michèle Alliot-Marie ministre du travail. Pour le poste de Premier Ministre, je me méfie beaucoup de Jean-Louis Borloo, même s'il est particulièrement populaire au centre et chez les écologistes, cela semble aujourd'hui l'hypothèse la plus probable.

Pour l'UMP, il faut tout changer, du sol au plafond. L'idéal serait certainement que François Fillon en prenne la tête (il est difficile de savoir où le mettre), ou à défaut Jean-François Copé qui peut difficilement être plus terne que celui qui occupe actuellement le poste. Il faut surtout que Frédéric Lefebvre (que je surnomme parfois le "repoussoir à électeurs") quitte ses fonctions de porte-parole. A la place, je verrai bien le très sérieux Hervé Mariton, très à l'aise dans les médias, et dont le quotient intellectuel est aussi élevé que celui de Lefebvre est bas.

Voilà pour ce mélange entre mes pronostics et mes souhaits...

2 commentaires:

Landry a dit…

Cher Vincent,
C'est un plaisir renouvelé que de lire ton blog, et je suis bien content que tu trouves quand même encore un peu de temps pour le mettre à jour.

Je suis tout à fait d'accord avec toi sur la nécessité d'ordre économique d'une réforme des retraites. Le fouillis médiatique actuel m'empêche d'avoir une vision très claire du texte qui va être proposé, cependant un point relevé par la gauche et les syndicats me turlupine encore: sais-tu comment trouver du travail pour les seniors dans un pays où 10% de la population active est au chômage ? Je veux bien croire que le repoussement de l'âge de la retraite crée un "appel d'air" comme tu l'avais évoqué il y a quelques temps, mais comment cela doit-il suffire à faire augmenter de manière globale le nombre de salariés si la croissance n'est pas au rendez-vous ? Comment ne pas craindre une montée de la précarité pour les personnes déjà les plus vulnérables ?

En ce qui concerne la déchéance de nationalité, ne crois-tu pas que ce qui est choquant est surtout le fait de considérer deux types de nationalités, de naissance et acquise ? En outre comme tu le dis le nombre de gens concernés risque d'être très restreint, et ne trouves-tu pas répugnants les effets d'annonce comme celui-ci, dont le but semble surtout de récupérer les voix de l'extrême-droite ?

Thibault a dit…

Les mots sont importants et rarement choisis ou prononcé au hasard, surtout quand ils sortent de la bouche d’Eric Woerth sur la question de la réforme des retraites. Voici ce qu’il a dit devant les élus de la France.



« 100% des français aujourd’hui, tous les français aujourd’hui, considèrent qu’il faut faire quelque chose pour réformer le système des retraites. C’est au moins une bataille de l’opinion que nous avons totalement gagné. »



Je reprends cette citation car elle m’a singulièrement interpellée. Il a bien dit « bataille d’opinion que nous avons gagné» et non pas « démonstration implacable de la réalité économique de notre pays que nous avons mené à terme et su transmettre aux Français.». Il ne s’agit donc pas de démonstration ou de rationalité mais de conviction et de sentiment. Cette phrase illustre bien la ligne gouvernementale sur la question des retraites. On martèle l’idée qu’on ne peut pas faire autrement pendant des mois et des mois. Une fois que tous penseront qu’une réforme est inévitable, il sera bien plus facile de faire passer une réforme qu’elle soit juste ou injuste (là n’est pas la question de mon propos).



Alors que Nicolas Sarkozy a construit son mandat sur le Président qui peut tout quand il le veut, qui est sur tous les fronts et dont la seule volonté permet de résoudre les problèmes, voilà que sur la question des retraites, subitement la volonté politique et présidentielle ne suffirait plus. Bien au contraire je crois qu’en politique quand on veut on peut. Et que si le pouvoir politique en place a décidé pour la première fois depuis la Présidence de Nicolas Sarkozy d’admettre qu’il ne peut faire autrement, c’est que les raisons profondes de leur choix et arbitrages ne sont pas avouables en tout cas politiquement. Car ici le gouvernement fait bien un arbitrage et non une réforme le couteau sous la gorge. (Honnêtement tu vois quelque un imposé quelque chose à N.S. ?)



En politique tout est question d’axiomes, de règles de base et de convictions qu’on se fixe. C’est sur cette grille de croyances que sont réalisés les arbitrages entre les différentes priorités qui se présentent. L’axiome de base peut être que le bonheur des Français est de travailler moins ou il peut être que le bonheur des Français passe par un redressement radical des comptes publics afin de ne pas voir la note de la dette française dégradée ce qui causerait une explosion du cout de la dette publique. Le génie politique du gouvernement en place a été de transformer la conclusion de leur raisonnement (« on ne peut faire autrement ») basé sur leurs axiomes et croyances (« car on doit réconforter les marchés et car politiquement Sarkozy doit mener une grande réforme sinon il est mort en 2012») en un axiome partagé par tous. Mais en « bon scientifique », il faut savoir déconstruire les raisonnements et parfois savoir remettre en cause les axiomes de base. Dire qu’on ne peut pas faire autrement n’est pas une vérité absolue, c’est une vérité étant donné les axiomes de base du gouvernement en place. Ce sont ces axiomes que les manifestations remettent en cause.



Un dernier petit point, l’idée que le pouvoir en place « n’a pas le choix » et « qu’on ne peut pas faire autrement » est choquante. Cela est révélateur de la lâcheté et de la désertion des élites et gouvernants français face à leur responsabilité. Il est trop facile pour toi comme pour moi de dire qu’on ne peut pas faire autrement car au fond nous profitons du statu quo et de la non remise en cause des axiomes de base. Je ne pense pas que la France nous ai éduquée et choyée pour que nous laquions d'imagination afin de garantir à nos concitoyens le bonheur qu'ils méritent.